ma salade d'hiver

La cueillette en hiver

L’hiver, une saison où la nature est endormie? Pas si sûr.. voilà ce que j’ai pu voir et cueillir lors d’une cueillette sauvage de fin janvier à Genève!

Dans l’espace de quelques mètres carrés, en moins de 15 minutes, j’ai récolté de quoi me faire une salade.

Vous en avez reconnues? Parmi d’autres on peut apercevoir, de la lampsane, du laiteron maraîcher, du gaillet gratteron, de l’ail sauvage (des vignes) et du sisymbre officinal. Pas loin il y avait même des fleurs de pâquerettes et pissenlits, ainsi que de l’alliaire et du lierre terrestre. Je parlerai une autre fois du cerfeuil des bois qui est visible dans la photo centrale. Pas si mal pour une cueillette d’hiver, non?

Les avantages de la cueillette d’hiver

Pourquoi je vais cueillir en plein hiver à -2°..? Il y a plusieurs raisons, déjà premièrement pour le plaisir de passer un moment dehors à l’air frais et au calme. Oui, les promeneurs et les coureurs sont peu nombreux par rapport à la belle saison. Ça favorise une vraie immersion dans la nature, un contact privilégié avec les éléments. Bien-sûr il faut un peu de tolérance au froid mais ça s’acquiert rapidement et au final on est bien récompensés.

Puis, très important pour l’apprenti cueilleur, ça permet d’observer les plantes à un stade de croissance qu’on a pas trop l’habitude de voir. Bien que ça fait plusieurs années que je cueille des plantes pour les manger, je me considère toujours comme un apprenti cueilleur. À chaque fois je découvre quelque chose que je ne connaissais pas ou alors je trouve des éléments qui me permettent de confirmer ce que je savais, gagnant ainsi en confiance.

Bonnes pour la santé

Autre aspect important: celui de la santé. En effet en hiver on peut récolter des plantes qui sont toutes jeunes et tendres, le moment idéal pour les manger crues. Cela signifie un plus grand contenu en vitamines et enzymes, qui ne sont pas détruits par la cuisson. Une bonne occasion pour contrebalancer les excès de nourriture grasse et sucrée qu’on a tendance à consommer durant les fêtes et plus généralement en période froide. Sans entrer dans les détails, je dirais qu’une chose: mangez des plantes sauvages crues et votre système immunitaire vous en sera reconnaissant!

Bonnes pour la vue et le palais

Enfin, un autre facteur appréciable est la bonne qualité des jeunes plantes. En cette saison les insectes gourmands et autres gastéropodes sont au repos. Rares sont ceux qui s’aventurent en dehors de leurs abris pour goûter aux plantes. Ce qui veut dire qu’on aura des feuilles propres, intactes, et saines. Oui, saines car les maladies cryptogamiques comme le mildiou ne peuvent pas sévir à cause du froid.

Donc, vu tous ces avantages, je dirais que se refroidir un peu les mains ça vaut la peine. Sans oublier qu’une exposition au froid modérée, sans dépasser ses propres limites, ne peut que nous renforcer. Encore un point à faveur du maintien de la bonne santé.. mais ça c’est une autre histoire.

Les risques potentiels

À part le risque déjà évoqué de se geler les mains, ce qui pourrait arriver si on est tellement pris par la ferveur de cueillir, au point de ne plus sentir le froid 😉

Plus sérieusement, le plus grand risque est de ne par reconnaître les plantes. En effet au début de leur croissance elles ne nous montrent pas grand-chose. Pas de fleurs, pas de tige donc pas de feuilles caulinaires (celles qui poussent sur la tige). Bref, il faut se contenter des feuilles basales et parfois ça peut semer le doute.

Assez caractéristiques les feuilles d’alliaire et de lierre terrestre, elles ont une certaine ressemblance entre elles, les deux ont les bords crénelés. En cas de doute il suffira de bien les froisser et de les approcher du nez. Si vous n’êtes pas complètement enrhumé, vous allez sans doute retrouver l’odeur d’ail pour l’une et la typique odeur aromatique et bien prononcée pour l’autre.

Pas de problème non plus pour l’ail des vignes, ses touffes évoquent fortement la ciboulette et le test olfactif donnera le verdict définitif. Toutefois, allez-y avec prudence, il existe des plantes toxiques qui ont des feuilles semblables! Ne jamais les consommer si elles n’ont pas une évidente odeur d’ail.

Quant au gaillet gratteron, il est un peu trompeur parce que à cet état très jeune il ne «gratte» pas encore. Peu importe, on peut manger tous les gaillets et on les reconnaît facilement par leurs feuilles en verticilles. Là où je l’ai cueilli je sais que c’est lui qui apparaît en premier et j’en profite pour le déguster cru en salade sans me râper la bouche.

Gaillet gratteron
Gaillet gratteron

Des plantes semblables

C’est avec les trois restantes que ça se complique un peu. Toutes ont les feuilles basales en rosette et leur forme se ressemble. Elles sont allongées, d’un vert à peu-près pareil et le lobe terminal est plus grand que les autres.

Le laiteron maraîcher et la lampsane (à propos de laquelle il existe un article plus détaillé ici) font partie de la famille des astéracées et sont censées avoir du latex blanc à l’intérieur des feuilles. Seulement que là ce n’était pas le cas, probablement elles étaient encore trop jeunes pour en avoir. Voilà encore un critère de reconnaissance qui s’en va…

Que faire alors? Sachant que ce type de feuilles se trouve aussi dans les laitues sauvages et les chicorées, ça fait un nombre de possibilités assez grand. La bonne nouvelle est que toutes ces plantes que je viens de citer sont comestibles et même fortement appréciées. À ma connaissance il n’y a pas de plantes toxiques avec ces mêmes caractéristiques, qui poussent dans les prairies et les jardins, surtout en plein hiver. Cela dit, j’invite bien évidemment à la prudence, quand on ne connaît pas on ne mange pas! Il vaut mieux attendre quelques semaines, en revenant régulièrement sur les lieux pour constater la croissance de la plante. Au fur et à mesure qu’elle poussera, son identification deviendra plus facile, car il y aura plus d’éléments visibles comme la tige, les fleurs, etc.

Le test organoleptique

Pour le moment ce qu’on peut faire pour avoir une idée de la famille à laquelle la plante appartient est de goûter un petit morceau de feuille. Si vous avez déjà goûté au pissenlit, vous retrouverez un goût amer très similaire dans les laiterons, lampsanes, laitues et chicorées. Cela permet de réduire la liste de possibilités et de se familiariser à ce goût, ce qui sera favorable aux reconnaissances futures.

Pour plus dé sécurité, recracher le morceau après en avoir constaté le goût. De cette façon le risque d’intoxication est quasi nul. Je me réfère ici aux plantes qui poussent en Europe centrale à basse altitude et dont les feuilles ressemblent à celles décrites plus haut. Je ne connais pas assez les plantes d’ailleurs pour pouvoir me prononcer sur leur toxicité. Quoi qu’il en soit vous êtes les seuls responsables de ce que vous mettez dans votre bouche! C’est une réalité générale qui s’applique aussi aux cueilleurs 😉

Sans oublier les brassicacées..

Il était question d’astéracées juste avant, je ne pourrais pas laisser en suspens le sisymbre officinal, la troisième plante que ressemble à la lampsane et au laiteron. Cette fois-ci c’en est une de la famille des brassicacées, la famille des choux, de la moutarde et de la roquette. Encore une fois le test olfactif et gustatif nous sera très utile, les plantes de cette famille ayant un goût et une odeur caractéristiques. Percevoir ce goût / cette odeur de chou ou de roquette est un assez bon signe! Les chances de se trouver face à une plante comestible sont plutôt bonnes.

Dans le cas présent je trouve que le sisymbre a quelques ressemblances avec une autre brassicacée répandue dans toute l’Europe, la barbarée commune. Heureusement c’est aussi une plante comestible, voilà à quoi ressemble sa rosette. (photo de Tela-Botanica)

Barbarea vulgaris

Conclusion

Pour conclure je dirais qu’il y a trois choses importantes à retenir à propos de la cueillette en hiver.

Premièrement, oui c’est possible! On peut trouver des plantes comestibles même en janvier, il faut juste le vouloir. Ça vaut la peine, essayez et donnez moi des nouvelles.

Deuxième chose: ATTENTION ! Reconnaître les plantes est plus difficile si on ne dispose que de quelques feuilles basale. Bien vérifier par différents moyens afin d’être sur de ce que l’on mange.

Et trois: toujours sentir l’odeur de la plante qu’on est en train d’analyser et si on se sent assez sûr d’en avoir une qui est comestible, déguster un petit morceau. Inutile par contre de goûter quand on sait d’avance que la plante n’est pas comestible. Ça relève du bon sens mais je préfère le préciser 😉

En espérant avoir pu aider et motiver au moins quelques lecteurs, je vous souhaite des riches et bénéfiques cueillettes!

Salade d'hiver

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